Téléchargé près de 7,5 millions de fois aux États-Unis, BeReal est un réseau social français qui capture les moments de la vie quotidienne de ses utilisateurs. Loin de favoriser les courses aux likes, aux vues et aux partages, l’app n’est destinée ni aux marques, ni aux influenceurs, mais bel et bien aux amis. (Photo : Compte Twitter BeReal)

Application gratuite la plus téléchargée aux États-Unis cet été – 7,41 millions de fois selon le cabinet d’études Apptopia – BeReal est le nouveau réseau social phénomène. Créé en 2020 par le Français Alexis Barreyat, son principe est inédit. Chaque jour, à une heure précise, il envoie une notification aux utilisateurs leur demandant de poster deux photos dans les deux minutes qui suivent. Sur la première, l’abonné montre l’endroit où il se trouve ou ce qu’il fait au moment dit. La seconde, captée par la caméra frontale, dévoile le visage de la personne, sans filtre ni retouche. Les utilisateurs n’ont aucune obligation de publier une photo. C’est en revanche la condition pour accéder aux clichés de leurs amis. L’app propose cependant aux retardataires de publier un “late BeReal”, quelques minutes ou heures après la notification, dans le cas où ils l’auraient ratée.

Une adoption en forte hausse

Classement Data.ai des applications les plus téléchargées en France sur Apple et Android confondus. (Crédit : Data.ai)

En France, l’application prend de l’ampleur au point d’atteindre la quatrième place le 20 septembre des applications les plus téléchargées dans l’Appstore et Google Play (Android). Apple l’a d’ailleurs également intégrée dans son onglet « incontournables ». Cependant, le cabinet d’étude Forrester relativise ce succès. Sa dernière étude, « Consumer energy index and retail pulse survey » parue en août 2022 révèle qu’aux États-Unis seuls 2 % des adultes et 5 % des adultes de la génération Z utilisent BeReal au moins une fois par semaine. « L’app n’a encore qu’une faible portée et ne rendra personne célèbre contrairement à TikTok ou Instagram, estime Mike Proulx, vice-président et directeur de recherche du cabinet d’étude Forrester. Quant aux marques, elles peuvent l’expérimenter, mais elles n’obtiendront aucun retour sur investissement aujourd’hui. Au mieux, elles obtiendront un gros titre dans la presse spécialisée pour avoir été les premières à l’adopter ». Une analyse d’autant plus justifiée que les conditions d’utilisations du réseau social spécifient « qu’il est interdit d’utiliser la plateforme à des fins publicitaires ou commerciales ».

Instagram développe une fonction similaire

Même si l’équipe ne s’exprime pas directement, BeReal affiche en effet une volonté de revenir aux sources des médias sociaux, avec le partage de moments de vie quotidienne entre amis. Entre les lignes, l’app espère s’opposer à Instagram qui s’éloigne de plus en plus de ses racines et du partage de photos. L’autre réseau social de Meta s’appuie désormais sur des recommandations algorithmiques à visée commerciale la plupart du temps, ainsi que de nouveaux formats (vidéos courtes, stories). Avec des règles qui changent quasi quotidiennement, qui plus est, au grand dam des utilisateurs en quête de notoriété. Face au succès de la jeune pousse française, Instagram serait d’ailleurs en train de développer une fonction semblable à BeReal – comme il l’a déjà fait avec les reels inspirés par TikTok –.

Selon Mike Proulx, « BeReal comble le vide de l’échange de moments simples entre amis ». Reste à savoir quel modèle économique la jeune pousse française imagine pour croître si elle ne mise pas sur les marques et le commerce. Un abonnement payant nécessite une base d’abonnés importante et se révèle souvent difficile après un démarrage en offre gratuite.

 

Clémence Tingry